Misha Uzan. Avec Tel-avivre.com
Shaul Tchernichovsky |
Si Bialik est le Baudelaire israélien, Tchernichovsky peut être
l'Apollinaire ou le Chateaubriand d'Israël. Si Bialik est le poète numéro 1
d'Israël, Tchernichovsky est le numéro 2.
Né en 1875, contemporain de Bialik, il occupe comme lui, une place centrale
au sein de la poésie en hébreu et en Israël. Et comme Bialik, chaque enfant à
l'école, se doit d'apprendre quelques textes de Tchernichovski.
En témoigne sa place sur les pièces de monnaie. En 2011 en effet, Shaul
Tchernichovsky a été choisi pour être l'un des quatre grands poètes israéliens,
dont les portraits seraient sur la monnaie israélienne (avec lui ont été
choisis Leah Goldberg, Rachel Bluwstein et Nathan Alterman).
Tel Aviv lui a aussi rendu hommage. Après sa mort en effet, en 1943, la
municipalité a fait honneur à son talent de traducteur en dédiant un prix de
traduction à son nom. Une école de Tel-Aviv est également nommée Tchernichovsky,
tout comme le centre de l'Association des écrivains hébreux en Israël.
Tel Aviv possède aussi, évidemment, sa rue Tchernichovsky. Elle contraste
toutefois avec la rue Bialik car elle ne comporte pas particulièrement de belle
maison, de musée ou de monuments. La rue Tchernichovsky commence au croisement
avec le centre commercial Dizengoff, qu'elle longe en tournant. Elle croise
ensuite la rue Bograshov et un petit square. Mais son intérêt se trouve surtout
à l'entrée du Parc Méïr, du nom de Méïr Dizengoff, qu'elle longe sur sa partie
ouest. Le parc est un espace vert relativement grand en plein centre-ville. On
est loin de Hyde Park ou de Central Park, mais c'est un lieu de détente
agréable pour les enfants, pour les joueurs de ping-pong, pour ceux qui veulent
promener leurs chiens dans un domaine réservé, ou pour la communauté gay qui se
réunit dans le centre communautaire qui se trouve à l'intérieur du parc, à côté
du Café Café. La rue Tchernichovsky se poursuit ensuite jusqu'à l'avenue
Allenby. Symboliquement la rue se trouve juste après la rue Bialik en venant de
la mer, comme pour faire honneur au premier puis au deuxième grand poète
d'Israël.
Né le 20 Août 1875 dans le village de Mikhaelovka, en Crimée (qui fait
maintenant partie de l'Ukraine), Shaul Tchernichovsky était un poète fortement
influencé par la culture de la Grèce antique. Il publie ses premiers poèmes dès
l'âge de quinze ans, à Odessa où il a étudié de 1890 à 1892. Après avoir étudié
la médecine à Heidelberg en Allemagne, puis à Lausanne, il mène de front ses
activités de médecin et de poète. A Kiev, à Kharkov, à Minsk ou Saint
Ptersbourg, il écrit de la poésie mais aussi pour le journal hébraïque
Hatekufa, de 1925 à 1932. Il passe aussi une période de sa vie en Amérique, de
1929 à 1930. Il n'immigre au pays d'Israël qu'en 1931 et s'y installe
définitivement. Il est connu aussi pour ses nombreuses traductions en hébreu
d'œuvres majeures telles que L'Iliade et l'Odyssée d'Homère ou encore Sophocle,
Horace, Shakespeare, Molière, Pouchkine, Goethe, Heine, Byron, Shelley, et l'épopée
de Gilgamesh.
Il fut aussi rédacteur en chef du manuel de terminologie en hébreu pour la
médecine et les sciences naturelles.
Il fut encore membre permanent de l'Association des écrivains hébreux et du
Comité de la langue hébraïque, qui fixa l'hébreu moderne.
Shaul Tchernichovsky a obtenu deux fois le Prix Bialik pour la littérature,
en 1940 (conjointement avec Zelda Mishkovsky) et en 1942 (conjointement avec
Haim Hazaz). Sa poésie est un mélange d'influences du patrimoine culturel juif
et du patrimoine culturel mondial. Il écrit d'une part sur des sujets
proprement juifs, en particulier sur le roi Saul, comme dans "En
Endor", qui décrit de façon spectaculaire la condition de Saül à la fin de
sa vie. Mais d'autre part, aussi, en affinité avec la culture grecque antique,
comme dans le poème "Avant une statue d'Apollon", qui est une
identification avec la beauté qu'elle représente et qu'admire Tchernichovsky.
Tchernichovsky, mort en 1943 à Jérusalem, a traité aussi de sujets très
contemporains de son époque, notamment en écrivant sur la Shoa dans "Les
morts de Tirmonye" et "Balades de Worms". Vers la fin de sa vie,
il composa également des poèmes sur l'enfance. Ces poèmes sont souvent
qualifiés d'idylles, certains pensent qu'ils servent d'exemple et de modèle
pour tous les idylles qui ont été écrits ensuite en hébreu. Poète, spécialiste
du sonnet, plusieurs de ses poèmes ont encore été mis en musique par les
meilleurs compositeurs populaires, tels que Yoel Ange et Nahum Nardi, et
chantés par Shlomo Artzi pour Omrim yeshna eretz
par exemple, ou Naomi Shemer pour Hou Artzi Moladti, des chansons
populaires parmi les Tel Aviviens et tous les Israéliens.
Misha Uzan - Tel-avivre.com
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